Comment retrouver le goût des choses de l’enfance ? Récemment, j’ai déniché une vieille recette de ma mère. Je l’ai lue. L’eau me venait à la bouche et le feu au cœur. Je me suis au fourneau de suite. J’ai mélangé tout mon amour avec les ingrédients requis par le plat à préparer. Et sans me vanter le résultat final n’était pas mal du tout. Y manquait quelque chose quand même : le soleil de ma jeunesse, quand s’ouvrait devant moi mille possibles. Le matin, je m’imaginais alpiniste, virologue, voyageur interstellaire, créateur de bijoux... Et le soir, journaliste, député, joueur de tennis professionnel, pâtissier réputé... Ledîner était réussi. Mes sœurs et moi, on s’en est fourré jusque là, on s’est régalé, on s’est dit que maman serait contente de nous voir réunis par sa cuisine. Il y avait tout de même une pointe d’amertume au fond de la marmite : la certitude de ne plus pouvoir être autre chose que ce qu’on était.